Présentation du thème du Congrès NLS 2025
par Patricia Bosquin-Caroz
Les amours douloureuses
Le titre, « Les amours douloureuses », consonne avec les amours malheureuses. Il évoque la dimension dramatique, voire tragique de l’amour ou des amours. Le terme « douloureux », lui, laisse entendre une tonalité d’excès dans la peine éprouvée. Ainsi, certains affects, comme la tristesse, font signe d’un mal-être, d’autres, comme l’angoisse, connotent un franchissement de la limite du supportable. Freud a placé au centre de la problématique de la souffrance psychique la tension entre principe de plaisir et au-delà du principe de plaisir. Lacan, quant à lui, a mis en lumière une étrange satisfaction, mixte de plaisir et de douleur, qu’il a désignée sous le vocable de jouissance. Toute une littérature, à laquelle Roland Barthes se réfère dans son essai Fragments d’un discours amoureux, fait fond sur les douleurs d’amour ; le mal d’amour se déclinant en une variété de manifestations : l’attente, l’ascèse, le ravissement, la compassion, la dépendance, l’exil, l’errance, la jalousie etc. Plus récemment, le titre de l’oeuvre de Sophie Calle sur le deuil amoureux, Douleur exquise, fait aussi résonner une satisfaction paradoxale.
À partir de différentes approches de l’amour dans l’enseignement de Lacan, non sans les apports de Freud, à notre tour nous explorerons les ressorts des amours douloureuses.
Manque, dépit et tristesse
Dans le Séminaire Le transfert, Lacan met au coeur du problème de l’amour, la fonction du manque. Il en extrait une définition : l’amour, c’est donner ce qu’on n’a pas (1). En même temps, il souligne que ce qui manque à l’un n’est pas ce qui manque à l’autre : la dissymétrie entre l’amant et l’aimé constitue le problème de l’amour. « Il suffit, dit-il, d’être dans le coup, d’aimer, pour être pris à cette béance, à ce discord. (2) » Mais c’est justement de la non conjonction du désir avec son objet que doit surgir la signification d’amour au terme d’une opération spécifique : la métaphore de l’amour. On reconnaît là les prémisses de son assertion plus tardive : l’amour supplée au non rapport sexuel. La métaphore de l’amour relève de la contingence. Quand elle a lieu, le miracle se produit, dans le cas contraire, la déception ou la désolation sont au rendez-vous. Dans Le Banquet de Platon, la scène qu’Alcibiade fait à Socrate témoigne de son dépit face au refus du don du signe d’amour. Socrate n’aime pas, affirme Lacan, déjà attentif à la valeur et à l’impact du signe d’amour en tant qu’il s’adresse à l’être.
Lacan conteste la conception de l’amour qui rassemble, agglomère, assimile, agglutine des êtres complémentaires. Il balaie cette illusion de l’amour fusion adossée à la forme idéale de la sphère. Il observe également que l’adhésion affective à ces formes pleines trouve ses fondements dans la structure imaginaire et la « Verwerfung de la castration (3) ».
Lacan se réfère aussi à Freud pour qui le fondement de l’amour, est le Lust-Ich, et l’amour effet du narcissisme (4).
Ainsi, dans le Séminaire La logique du fantasme, il avance la formule suivante : « Tu n’es que ce que je suis. Tu n’es pas, donc je ne suis pas » (5). Ou encore : « Si tu n’es pas, je meurs » (6). Vérité, dit-il, donnant le sens de l’éros et qui, du fait d’être rejetée, réapparaît dans le réel sous la forme d’un « monstre dont nous connaissons assez bien les effets dans la vie de chaque jour ». Il poursuit : « Comme je l’énonce de toute Verwerfung […], l’amour se manifeste dans le réel par les effets les plus incommodes et les plus déprimants. Les voies de l’amour ne sont nulle part à désigner comme si aisément tracées. (7) » Lacan le note, l’amour ne pense pas. Autrement dit, l’amour méconnaît le fantasme narcissique dont il se soutient. C’est alors qu’il peut prendre la couleur de la dépression, ou de la tristesse, en tant que cet affect indique le refus ou le rejet du savoir inconscient.
Dans Télévision, Lacan corrèle explicitement la tristesse à une faute morale qui, dit-il, « ne se situe en dernier ressort que de la pensée, soit du devoir de bien dire ou de s’y retrouver dans l’inconscient, dans la structure (8) ». Il arrache l’affect au registre émotionnel et l’articule à l’éthique du bien dire, « consistant à cerner, à serrer, dans le savoir, ce qui ne peut se dire (9) ». Alors que la tristesse, énonce Jacques-Alain Miller, est un savoir manqué.
La même année dans sa « Note italienne », Lacan émettra le voeu, concernant la psychanalyse, « d’agrandir les ressources grâce à quoi ce fâcheux rapport, on parviendrait à s’en passer pour faire l’amour plus digne que le foisonnement de bavardage, qu’il constitue à ce jour (10) ».
Amours et discours
Cependant, il fallut attendre le Moyen Âge pour voir apparaître la promotion de l’amour réciproque malheureux sous la forme de l’amour courtois. Lacan attribue l’émergence de cette forme d’amour à la contingence d’une rencontre entre l’hérésie cathare et une nouvelle poésie des troubadours. Pour lui, l’amour passion est d’abord un fait de discours qui n’arrive pas à n’importe quelle époque. Il le qualifie de « mauvais rêve impossible dit de la féodalité » où « du côté de la femme, il y avait quelque chose qui ne pouvait plus du tout marcher (11) ». Lors de son Séminaire Encore, il situe cette invention de discours comme le seul moyen pour l’homme, dont la Dame était entièrement la sujette, de « se tirer d’affaire avec élégance de l’absence de rapport sexuel (12) ». L’homme s’en sort, en effet, par une idéalisation de la Dame et une valorisation de son inaccessibilité, tandis que le discours amoureux s’alimente du manque, du deuil, de la perte, de la mort. Dans son Séminaire L’éthique de la psychanalyse, Lacan remarque la précision de l’« organisation artificielle, artificieuse du signifiant (13) », de ce discours fixant à un moment le cadre d’une ascèse. La suspension du plaisir charnel, la conduite du détour et l’inaccessibilité de l’objet valent alors comme discipline du plaisir ou du non plaisir. En fait preuve l’arbitraire des exigences de l’épreuve infligée à son servant par la Dame, non sans une certaine cruauté. Lacan relève d’ailleurs que les pratiques amoureuses les plus ascétiques ont été empruntées à L’Art d’aimer d’Ovide qui comparait l’amour à une espèce de service militaire.
Pareillement, il souligne l’incidence décisive du signifiant et du passage à la lettre de cet art d’aimer dans la culture. L’amour romantique en sera une forme de résurgence.
On le voit, l’amour n’est pas sans rapport avec l’Idéal que véhicule la tradition ordonnant les rapports entre les sexes. Mais, à cet ordre ancien, « âge du Père », structuré par une logique verticale, s’est substituée une logique horizontale, celle du réseau affine avec le pas-tout, comme Jacques- Alain Miller l’a fait valoir. (14) Dans cette perspective, les reconfigurations actuelles de la cellule conjugale en une variété d’arrangements, comme celui du « polyamour » ou du « trouple » se substituant au duo standard, changeraient-elles la nature des affres de l’amour ? En tout état de cause, les souffrances d’amour sont interprétées aujourd’hui différemment de jadis. Au discours amoureux, appréhendé à partir du manque, de l’objet perdu, ou de l’Idéal inaccessible, s’est substitué un autre discours rabattant le ratage sur l’axe imaginaire dominant-dominé. Lors du dernier Congrès de l’AMP, Jacques-Alain Miller en a constaté la prégnance sur les rapports amoureux.
Alors que le champ semblait plus ouvert et propice à l’invention, ont fait irruption des signifiants appartenant au lexique de lutte des sexes déjà prophétisée par Lacan : emprise, manipulation, domination, forçage, abus, ghosting… En contrepoint se promeut une forme d’amour prétendument consensuelle fondée sur une reconnaissance mutuelle et régie essentiellement par le régime homéostatique du principe de plaisir. Les mouvements féministes ont politisé la sphère privée. Au nom de l’égalité des sujets de droit, ils ont contribué à ce que le discours juridique s’interpose entre les sexes, et souvent pour un mieux. Mais aujourd’hui, avec la coalescence du néoféminisme et de l’idéologie victimaire, on assiste à une politisation de l’intime. Celle-ci , tout en épousant les nouvelles normes de discours, s’acharne sur un patriarcat déjà sur le déclin. La guerre des sexes s’attise et le plus souvent pour le pire. Dès-lors, ne pouvons-nous pas voir dans cette attribution des souffrances amoureuses à la domination d’un sexe sur l’autre, en l’occurrence celui de l’homme sur la femme, une nouvelle forme de rejet de l’amour et de ses risques ? Le récent succès planétaire du film Barbie semble assurément le montrer.
Dans ce contexte adossé au discours de la science, seul le discours analytique ferait encore place au réel de l’éros.
Une affaire de structure
L’amour n’est pas seulement relatif aux effets de discours, variant selon l’époque, il est aussi affaire de structure. Grâce aux hystériques, Freud s’est d’emblée intéressé au phenomena amoureux. À plusieurs reprises, il a étudié son fonctionnement. Dans son texte « Psychologie des foules et analyse du moi (15) », il a consacré un chapitre entier à l’état amoureux et à l’hypnose. Il prend l’exemple de l’amour romanesque du jeune homme afin d’exemplifier l’appauvrissement du moi face à l’objet précieux, magnifié en place d’Idéal du moi. Dans l’état amoureux, celui-ci prendrait finalement possession de la totalité de l’amour de soi, dépossédant le moi de tout esprit critique. Freud qualifie ce phénomène « d’autosacrifice » et le rapproche de l’état de l’hypnotisé. Ses mots sont forts : absorption du moi par l’objet, abandon du moi, sujétion, fascination. Il n’est dès lors pas surprenant qu’à l’occasion d’un deuil, d’une rupture ou d’une trahison, le sujet se sente amputé d’une part de lui-même – mutilation qui ne va pas sans son lot de douleur.
Dans son dernier enseignement, Lacan va situer le drame amoureux proprement dit au regard de la rencontre amoureuse comme telle. Celle-ci ne va plus concerner deux sujets du manque-à-être mais deux corps parlants « affecté[s] en tant que sujet du savoir inconscient (16) ». Dans son Séminaire Encore, il énonce : « Car il n’y a là rien d’autre que rencontre, la rencontre chez le partenaire des symptômes, des affects, de tout ce qui chez chacun marque la trace de son exil, non comme sujet, mais comme parlant, de son exil du rapport sexuel. (17) » Jacques-Alain Miller formule, dans L’os d’une cure (18), que dans la perspective du non rapport sexuel, et donc du partenaire symptôme, les êtres sexués font couple au niveau de la jouissance. Quant à la liaison symptomatique, elle serait relative aux structures signifiantes du corps qui déterminent un partenaire comme moyen de jouissance. En conséquence, il y a lieu de distinguer la structure du pour tout x de celle du pas-tout qui répartit les modes masculins et féminins de la sexuation et détermine le type de partenaire symptôme de chacun. Autant dire que de part et d’autre, on ne jouit pas et on ne pâtit pas de l’amour de la même façon. On attribue au parlêtre masculin le mode de jouir fétichiste relatif à l’objet a, et au parlêtre féminin l’illimité d’une jouissance dans son rapport à A barré. Les amours douloureuses peuvent donc se répartir selon une logique propre à chaque position sexuée ou chaque sexe. À l’un, la douleur circonscrite du symptôme, telle l’effet d’une écharde dans la chair. À l’autre, celle du sans limite du ravage et la dévastation totale. À l’un encore, le désagrément du dédoublement de la vie amoureuse propre à son ravalement. À l’autre, le risque des noces mortifères avec l’incube idéal au-delà du partenaire réel. Mais les amours douloureuses se rapportent aussi bien à la façon dont chaque corps parlant peut rester hermétique à la langue de l’autre. Ainsi, l’affect n’est pas « la voix du corps », son expressivité naturelle, mais signal d’un effet de jouissance corrélé à la marque signifiante. Dans une expérience analytique, on est conduit à mettre l’accent sur l’implication du signifiant dans l’affect, et, selon l’expression de Lacan, soulignée par Miller (19), de « vérifier l’affect » (20). Si, dans la plus classique appréhension, il s’agit d’en délivrer la vérité refoulée, dans la conception de l’affection traçante du corps par lalangue, il s’agira d’en isoler la marque traumatique se répercutant sur le malentendu entre les sexes.
Quand dans notre praxis se présentent des amours douloureuses, on les invite alors à se laisser prendre dans le filet des signifiants, afin de faire mentrer la jouissance en résonance avec la langue.
1 Cf. Lacan J., Le Séminaire, livre VIII, Le transfert, texte établi par J.-A. Miller, Paris,
2 Ibid., p. 53.
3 Lacan J., Le Séminaire, livre VIII, Le transfert, op. cit., p. 115.
4 Lacan J., Le Séminaire, livre XIV, La logique du fantasme, texte établi par J.-A. Miller,
5 Ibid., p. 144.
6 Ibid., p. 157.
7 Ibid., p. 144.
8 Lacan J., « Télévision », Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p. 526.
9 Miller J.-A., « Les affects dans l’expérience analytique », La Cause du désir, n° 93, 2016,
10 Lacan J., « Note italienne », Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p. 311.
11 Lacan J., Le Séminaire, livre XX, Encore, texte établi par J.-A. Miller, Paris, Seuil, 1975,
12 Ibid., p. 65.
13 Lacan J., Le Séminaire, livre VII, L’éthique de la psychanalyse, texte établi par J.-
14 Miller J.-A., Le Séminaire, livre VI, Le désir et son interprétation, texte établi par J.-
15 Freud S., « Psychologie des foules et analyse du moi », Essais de psychanalyse, Paris,
16 Lacan J., Le Séminaire, livre XX, Encore, op. cit., p. 131.
17 Ibid., p. 132.
18 Miller J.-A., L’os d’une cure, Paris, Navarin éditeur, 2018.
19 Miller J.-A., « Les affects dans l’expérience analytique », op. cit. p. 101.
20 Lacan J., « Télévision », op. cit., p. 524.
Presentation of the 2025 NLS Congress Theme
by Patricia Bosquin-Caroz
Painful Loves
The title, “Painful Loves,” [“Les amours douloureuses”] is one consonant with unhappy loves [“Les amours malheureuses”]. It evokes the dramatic, even tragic, dimension of love, or of loves. As for the word “painful,” it suggests a tone of excess in the pain experienced. Some affects, such as sadness, are a sign of malaise, while others, such as anxiety, imply the crossing of unbearable limits. Freud placed the tension between the pleasure principle and the beyond of the pleasure principle at the heart of the problem of mental suffering. Lacan, for his part, highlighted a strange satisfaction, a mixture of pleasure and pain, which he called jouissance. An entire literature, to which Roland Barthes refers in his essay, “A Lover’s Discourse: Fragments,” focuses on the pangs of love, lovesickness examined in a variety of forms: expectation, asceticism, ravishment, compassion, dependence, exile, wandering, jealousy and so on. More recently, the title of Sophie Calle’s work on love bereavement, Exquisite Pain, also resonates as a paradoxical satisfaction.
Drawing on different approaches to love in Lacan’s teaching, not without Freud’s contributions, we in turn will explore the mainsprings of painful loves.
Lack, Disappointment and Sadness
In his Seminar, Transference, Lacan places the function of lack at the heart of the problem of love. He extracts a definition: “love is giving what you don’t have”.(1) At the same time, he points out that what is lacking in one person is not what is lacking in the other: the dissymmetry between the lover and the beloved constitutes the problem of love. “To be involved in this gap or discord”, Lacan says “it suffices to be in the thick of it, to be in love.”(2) But it is precisely from the non-conjunction of desire with its object that the meaning of love emerges at the end of a specific process: the metaphor of love. We can see here the premises of his later assertion: love makes up for the sexual non-relation [le non-rapport sexuel]. The metaphor of love is a matter of contingency. When it occurs, the miracle of love is produced; when it does not, disappointment or desolation is the result. In Plato’s Symposium, Alcibiades’ scene with Socrates bears witness to his frustration at Socrates’ refusal to give him any sign of love. Socrates does not love, says Lacan, who is already attentive to the value and impact of the sign of love in so far as it is addressed to being.
Lacan contests the concept of love as that which “unites, agglomerates, assimilates, and agglutinates”(3) complementary beings. He sweeps away this illusion of love as fusion, based on the ideal form of the sphere. He also observes that affective attachment to these solid forms finds its basis in the imaginary structure and “Verwerfung (foreclosure) of castration.”(4)
Lacan also refers to Freud, for whom the foundation of love is the Lust-Ich and love the effect of narcissism.(5)
In his seminar, La logique du fantasme, he thus puts forward the following formula: “You are only what I am. […] You are not, therefore I am not.”(6) Or, “If you are not, I die.”(7) A truth, he says, giving the meaning of eros, and which, because it has been rejected, reappears in the real in the form of a “monster whose effects we know quite well enough in everyday life.” He continues: “As I state with every Verwerfung [...], love manifests itself in the real through the most inconvenient and depressing effects. The ways of love are nowhere to be designated as being so easily traced.”(8) As Lacan notes, love does not think. In other words, love ignores [méconnaît] the narcissistic fantasy from which it draws its support. This is when it can take on the colour of depression, or sadness, insofar as this affect indicates the refusal or rejection of unconscious knowledge.
In Television, Lacan explicitly correlates sadness with a moral failing, which, he says, is ultimately “located only in relation to thought, that is, in the duty to be Well-spoken, to find one’s way in dealing with the unconscious, with the structure.”(9) He takes affect out of the emotional register and links it to the ethics of saying-well, “which consists in pinpointing, in circumscribing, in knowledge, that which cannot be said.”(10) In contrast to sadness, as Jacques-Alain Miller says, which is a knowledge manqué.
That same year, in his “Note Italienne,” Lacan expresses his wish, with regard to psychoanalysis, “to enlarge the resources thanks to which we can do without that unfortunate relation, in order to make love more worthy than the profusion of chatter that it constitutes to this day.”(11)
Loves and Discourse
It was not until the Middle Ages, however, that the promotion of unhappy reciprocal love appeared in the form of courtly love. Lacan attributes the emergence of this form of love to the contingency of an encounter between the Cathar heresy and the new poetry of the troubadours. For him, passionate love is first and foremost a fact of discourse that did not just come about at any given period. He describes it as an “impossible bad dream known as feudalism,” where “for woman, there was something that could no longer work at all.”(12) In his Seminar, Encore, he situates this invention of discourse as the only way for the man, whose Lady was entirely his subject, to “elegantly pull off the absence of the sexual relationship.”(13) Indeed, the man deals with this by idealizing the Lady and valorising her inaccessibility, while the amorous discourse feeds on lack, mourning, loss and death. In his Seminar, The Ethics of Psychoanalysis, Lacan notes the precision of the “artificial and cunning organization of the signifier” in this discourse “that lays down at a given moment the lines”(14) of an asceticism. The suspension of carnal pleasure, the negotiation of the detour [in the psyche], and the inaccessibility of the object are then considered as a discipline of pleasure or non-pleasure. This is demonstrated by the arbitrary demands of the test inflicted on her servant by the Lady, not without a certain cruelty. Lacan notes that the most ascetic practices of love have been borrowed from Ovid’s The Art of Love, which compares love to a kind of military service.
He likewise points out the decisive impact that the signifier and passage to the letter of this art of loving had on culture. Romantic love will be a form of resurgence of it.
As we can see, love is not unrelated to the Ideal conveyed by tradition, ordering relations between the sexes. But this old order, the “Age of the Father,” structured by a vertical logic, has been replaced by a horizontal logic, by networks(15) in the era of the not-all, as J.-A. Miller has proposed. In this perspective, do current reconfigurations of the conjugal unit into a variety of arrangements, such as “polyamory” or the “throuple,” replacing the standard duo, change the nature of the torments of love? In any case, the sufferings of love are being interpreted differently today compared to the past. The discourse of love, understood in terms of lack, the lost object or the unattainable Ideal, has been replaced by another discourse that places the failure of love on the imaginary dominant-dominated axis. At the last WAP Congress, J.-A. Miller noted its impact on love relationships.
Just when the field seemed more open and conducive to invention, signifiers belonging to the lexicon of the battle of the sexes – already prophesied by Lacan – burst onto the scene: control, manipulation, domination, forcing, abuse, ghosting... At the same time, a supposedly consensual form of love is being promoted, based on mutual recognition and governed essentially by the homeostatic principle of the pleasure principle. Feminist movements have politicized the private sphere. In the name of the equality of legal subjects, they have helped to ensure that legal discourse stands between the sexes, often for the better. But today, with the coalescence of neofeminism and victim ideology, we are witnessing a politicization of the intimate. While embracing the new norms of discourse, this politicization is attacking a patriarchy already in decline. The war of the sexes is heating up, often for the worse. So, in this attribution of amorous suffering to the domination of one sex over the other, namely that of men over women, may we not see a new form of rejection of love and its risks? The recent worldwide success of the film Barbie certainly seems to show this.
In this context, supported by scientific discourse, only the analytic discourse might still make room for the real of eros.
A Matter of Structure
Love is not just a matter of discourse, which varies according to the times; it is also a matter of structure.
Thanks to hysterics, Freud was interested in the phenomenon of love right from the start. He studied its workings on several occasions. In his work, Group Psychology and the Analysis of the Ego,(16) he devoted an entire chapter to being in love and hypnosis. He used the example of the young man’s romantic passion to illustrate the impoverishment of the ego before the precious object, magnified in the place of the ego ideal. The state of being in love ultimately takes possession of the totality of self-love, dispossessing the ego of any critical spirit. Freud called this phenomenon “self-sacrifice” and likened it to the state of being hypnotized. His words are powerful: an ego devoted to and consumed by the object, subjection, fascination.(17) It is hardly surprising, then, that in the event of bereavement, break-up or betrayal, the subject feels that part of himself has been amputated – a mutilation not without its share of pain.
In his last teaching, Lacan situates the drama of love per se in the context of the amorous encounter itself. This would no longer involve two subjects of the want-to-be [manque-à-être], but two speaking bodies “affected qua subject[s] of unconscious knowledge.”(18) In his Seminar, Encore, he says, “For here there is nothing but encounter, the encounter in the partner of symptoms and affects, of everything that marks in each of us the trace of his exile – not as a subject but as speaking – his exile from the sexual relationship.”(19) In Analysis Laid Bare,(20) Jacques-Alain Miller states that, in the perspective of there is no sexual relation – and thus of the partner-symptom – sexuated beings form a couple at the level of jouissance. As for the symptomatic connection, this is relative to the signifying structures of the body that determine a partner as a means of jouissance. Consequently, it is necessary to distinguish the structure of the for-all x from that of the not-all, which distributes the masculine and feminine modes of sexuation and determines the type of partner-symptom for each. In other words, one does not enjoy or suffer from love in the same way on either side. To the masculine parlêtre is attributed the fetishistic mode of jouissance relative to the object a, and to the feminine parlêtre the unlimited dimension of jouissance in its relation to barred A. Painful loves can therefore be distributed according to a logic specific to each sexuated position or each sex. For one, there is the circumscribed pain of the symptom, like the effect of a splinter in the flesh. For the other, the limitless pain of ravage and total devastation. For one, the bane of a split love life and its inherent debasement. For the other, the risk of mortifying nuptials with the ideal Incubus, beyond the real partner. But painful loves are just as much about the way in which each speaking body can remain hermetically sealed from the other’s language.
The affect is thus not “the voice of the body,” its natural expressivity, but the signal of an effect of jouissance correlated with the signifying mark. In an analytic experience, we are led to emphasize the implication of the signifier in the affect, and, according to Lacan’s expression, as underlined by J.-A. Miller,(21) to verify the affect.(22) If, in the most classical approach, it was a question of releasing the repressed truth, with the notion of an affection traced on the body by lalangue [l’affection traçante du corps par lalangue],(23) it will be a question of isolating the impact of the traumatic mark on the misunderstanding between the sexes.
In our praxis, when painful loves present themselves, we invite them to let themselves be caught in the net of signifiers, in order to make jouissance enter into resonance with language.
Translated by Pamela King
1 Cf. Lacan J., The Seminar of Jacques Lacan, Book VIII, Transference, ed. J.-A. Miller, tr. B. Fink, Cambridge, Polity, 2017, p. 34.
2 Ibid., p. 40.
3 Ibid., p. 89.
4 Ibid., p. 93.
5 Lacan J., Le Séminaire, livre XIV, La logique du fantasme, ed. J.-A. Miller, Paris, Seuil, 2023, p. 157.
6 Ibid., p. 144.
7 Ibid., p. 157.
8 Ibid., p. 144.
9 Lacan J., Television, A Challenge to the Psychoanalytic Establishment, tr. D. Hollier, R. Krauss, A. Michelson, New York/London, W. W. Norton & Co., 1990, p. 22.
10 Miller J.-A., “Les affects dans l’expérience analytique,” La Cause du désir, Issue93, 2016, p.110.
11 Lacan J., “Note italienne,” Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p.311.
12 Lacan J., The Seminar of Jacques Lacan, Book XX, Encore: On Feminine Sexuality, the Limits of Love and Knowledge, 1972-1973, ed. J.-A. Miller, tr. B. Fink, New York/London, W. W. Norton & Co., 1999, p. 86.
13 Ibid., p. 69.
14 Lacan J., The Seminar of Jacques Lacan, Book VII, The Ethics of Psychoanalysis, ed. J.-A. Miller, tr. D. Porter, New York/London, Routledge, 2008, p. 187.
15 Cf. Miller J.-A., the back cover of The Seminar of Jacques Lacan, Book VI, Desire and Its Interpretation, ed. J.-A. Miller, tr. B. Fink, Cambridge, Polity, 2019.
16 Freud S., “Group Psychology and the Analysis of the Ego”, The Standard Edition of the Complete Psychological Works of Sigmund Freud, Vol. XVIII (1920-1922), London, Vintage, 2001.
17 Cf. ibid, pp. 113-114.
18 Lacan J., The Seminar of Jacques Lacan, Book XX, Encore, op. cit., p. 144.
19 Ibid., p. 145.
20 Cf. Miller, J.-A., Analysis Laid Bare, WAP Libretto Series, New York, Lacanian Press, 2023.
21 Miller J.-A., “Les affects dans l’expérience analytique,” op.cit. p.101.
22 Lacan J., Television, op. cit., p. 20.
23 [TN: cf. Miller, J.-A., “affection traçante de la langue sur le corps,” “Orientation lacanienne. L’expérience du réel dans la cure analytique” (1998-1999), teaching delivered in the framework of the Department of Psychoanalysis, University Paris 8, lesson of 9 June 1999, unpublished.]